Le lexique consonantique

La Matière Manifestée

L - L’éLémentaire

Le sème « L » illustre la manifestation, à l’image du « Linga » de l’Indus, à celle du « Phal-Lus » grec et à celle du « Fiat Lux » latin : il est employé à ce titre pour nommer la lumière élémentaire, dépositaire de la matière, qui aurait caractérisé la catastrophe originelle ou notre big bang, et à tout le moins son éclat premier. Il est en ce sens proche du « R » qui nomme l’origine ( les deux consonnes « R » et « L » renvoient l’une et l’autre à une prononciation linguale et non labiale), et il signifie à ce titre « l’élémentaire » et le pli, donc la latéralité qui le fait paraître ; voire il se substitue parfois à ce même son « R » comme dans la langue japonaise qui prononce ce dernier phonème sous la forme orale du « L » en négligeant donc symboliquement le « R » originel (l’Onogoro des japonais se prononce ainsi Onogolo).

Le sème « L » des latins emprunte au « T » sa verticalité : il dessine comme lui un axis mundi, mais il le pose en revanche à l’inverse du « T », sur une assise horizontale. Celui du Lamed hébraïque « ל », en revanche ne pose pas de base à la verticalité : son dessin au contraire s’élève d’un coup d’aile au dessus des autres signes de l’alphabet hébraïque.

Ces deux dessins du phonème « L » suggèrent en ce sens une lecture alternative, à l’image de l’échelle de Jacob des hébreux (Sul-Lam) : ils figurent du haut vers le bas le dessin d’une qualité (KL), témoignant de la puissance mystérieuse et infinie du « K » de l’arbre de la nature, Kause, de l’éclat (KL) de l’état des choses de la réalité manifestée;
Mais le « L » s’envisage aussi à l’inverse comme le symbole d’une élévation d’IsraëL vers les ELohim de la Torah qui brassèrent l’univers, donc aussi vers le « LK » du Leuk (la base indo-européenne signifiant l’illumination), qui désignait l’éclairage posé par le lustre de l’objet lumineux. Le « L » est en ce sens régulièrement associé/opposé dans les abécédaires latins au sème « Y », avec lequel il constitue la syllabe « Lyl » de Lilith, dont le « Y » exprime la dualité de la lecture du « L ».

Le recours au « L » exprime à ce titre un double pari culturel:

Il renvoie d’abord à un premier pari consistant à distinguer la Lumière de l’Illumination :

Il signifie une Lumière élémentaire physiquement éclairante, qui serait issue de la vibration d’un Verbe originaire. L’Indus a nommé à cet égard le sème de la manifestation « Linga » avec ce « L », signifiant ainsi que la lumière serait à l’origine d’une onde cosmique: le signe de la manifestation (le Phal-Lus des grecs, ou le Fiat Lux des latins qui reprennent ce même phonème « L »), illustrant la façon dont Shiva, l’androgyne resplendissant à l’image du soleil créateur, structura l’univers en prenant la forme de la lumière. Il se le figurait à cet égard comme une colonne de lumière avec son Ha-Lo, dont l’origine était le Bindhu, le point limite du bord de la catastrophe originelle, et dont l’extrémité cependant était in finie.

Mais il signifie aussi par extrapolation, le symbole d’une illumination personnelle – voire d’une iLLusion - grâce à laquelle le sage rejoindrait l’originaire. Il rappelle que la racine indo-européenne Leuk et/ou Leig, qui initialisait la dénomination de Lak-Shimi, la parèdre de Vichnou, renvoyait à une LeKture du Shesha éternel qui lui était propre, ou à sa manière de le faire paraître et rayonner (LakShimi était également nommée à ce titre Sh-Ri) ; mais aussi, à l’inverse, que la racine opposée, KLeu, du mantra Klim, désignait l’éclat ou la qualité originels qui renvoient à l’élévation que permet cette lecture (dans cet esprit, les grecs nomment en ce sens la gloire, Kleos, comme le dissimulé).

Il appartient en ce sens à la moire grecque Lakhesis (LK) de dérouler le fil préalablement tissé par la moire Klotho (KL) pour le révéler et pour le faire exister. Et la dénomination de l’Illion dans l’Illiade d’Homère est aussi à ce titre une figuration symbolique destinée à suggérer la situation d’une Il-Lion lumineuse au cœur d’une Troie intraversable par les atrides, mais néanmoins offerte à Hé-Lène par Paris ; elle anticipe l’Aüf-Klarung (au dessus de l’éclat éclairant) germanique selon laquelle le Halo lumineux accompagne l’illumination.

Les langues latine, chinoise et grecque ont employé en ce sens le phonème « L » pour signifier la manifestation existentielle (entendue comme une apparition catastrophique phénoménale), et en l’associant à la notion de lumière.
A l’image du Linga indien, la langue chinoise a nommé avec la base indo-européenne « Leuk », le zéro : Ling (la langue française qui traduit ainsi le Ling des chinois par Zéro alors qu’elle traduit le Linga de l’Indus par Manifestation rappelle à cette opportunité le sens à donner au Zéro et à la Manifestation). Elle nomme de même la Le : l’éclair de la foudre à l’occasion de sa manifestation, et le Li signifiant à la fois l’unité dans sa diversité, et par extrapolation la ligne dessinée en fonction de cette unité naturelle, et la loi physique qu’elle détermine (à l’opposé de la loi des hommes).
La langue grecque en a fait logiquement dériver son Leukos (la clarté du blanc laiteux et lumineux du Kaolin de nos porcelaines), et sa Lexis, sa manière de poser sa parole, donc de la manifester ; mais elle a aussi associé son Logos (son verbe), son Legein (la faculté de réflexion du logos), et par extrapolation l’élégance du choix, à la base indo européenne « Leig ». La langue latine enfin et surtout, a fait un sort au phonème « L » en nommant avec lui la Lux de la lumière (Fiat Lux), le Lumen, la Longueur de la Ligne de l’étendue du monde manifesté, et la Lex, la Loi résultant d’une réflexion collective des êtres humains éclairés parce que parlementant, et donnant ainsi existence à cette Loi (Lex).

Le phonème « L » renvoie également à un second pari culturel : il propose de distinguer une Lumière manifestée nommée avec le « L », d’une Lumière originelle nommée avec le « R ».

Dire la Lumière des français, la Lux des latins, ou la Light du Lug (le soleil) des nord-européens, revient à l’associer à la manifestation de la catastrophe originelle (Linga), et conduit à la figurer comme l’é-Lément premier du monde manifesté, parce que sa vitesse et son mouvement lui donneraient l’élan nécessaire à sa matérialisation, pour analyser et expliquer ainsi le Lien de la Phusis. Elle est de ce point de vue la Qualité première de la nature qui s’oppose à l’Ob-scurité des Ténèbres qu’elle contribue à mettre objectivement en lumière, mais qui s’en distingue parce qu’elle est un fluide enveloppant plus qu’elle n’est un objet, quand les ténèbres en revanche sont objectives.
La dénomination de la Lumière est en ce sens initialisée par le « L » é-Lémentaire (les grecs diraient l’élément Lam-Bda). Elle nomme la ligne infinie du fluide lumineux, et sa conception rejoint la théorie scientifique contemporaine : dit avec les mots grecs, elle renvoie au Phos des Photons qui font ensemble la Lumière et contribuent ainsi à « faire » (lier) le phénomène de la matière, et aux ondes lumineuses dont les scientifiques contemporains constatent qu’elles la caractérisent.

Nommer la lumière avec le phonème « R » revient en revanche à l’associer à l’origine, et à sa radiation : L’Aurore.
L’Egypte qui se satisfaisait de nommer Atoum et Noun pour constater la manifestation catastrophique originelle, a négligé le phonème « L » comme elle négligea le phonème «V», et nommait en revanche la lumière du jour HeRou (à l’image de la face, Her, et en opposition à l’obscurcissement : Rouha), qu’elle associait d’évidence au Ra du soleil qui la distribuait. Elle suggérait, à l’image de l’Ahura de la Perse antique, une lumière envisagée par la face de l’Homme (Her) qui la reflétait, donc une lumière envisagée subjectivement.
Dans sa Genèse, Moïse l’a nommée pour sa part Aour (cf la syllabe Awr) en rappelant sa dimension originelle (Que la lumière – Awr - soit, et la Lumière fut. Genèse 1 :3), et il distingua la lumière du jour et celle de la nuit qu’il nomma ultérieurement (Dieu appela les ténèbres : Nuit – Layl -, et il y eut un soir et il y eut un matin, ce fut le premier jour. Genèse 1 :5), employant le « L » pour nommer les ténèbres, et suggérant ainsi une lumière divine (Awr) primordiale, préalable à la manifestation de la nuit (Layl) que nous associons aux ténèbres.
Ces deux langues, à la différence du latin ne recourent pas au « L » pour évoquer l’idée de la Lumière, mais chacune néanmoins nomme à sa manière la lumière divine d’un « Deum de Deo, Lumen de Lumine », la figurant comme étant l’origine qui précéda (que la lumière soit) et accompagna la manifestation catastrophique (que la lumière fut), conduisant ainsi à l’envisager, à l’image du « L » du Lamed hébraïque, comme une ligne infinie orientant la clairvoyance et l’élévation de la sagesse humaine.

En traduisant la lumière hébraïque Awr de la Parole de Moïse par Lux, la langue latine (Linga) des chrétiens a ainsi constaté un fait (Fiat), en rapprochant sa propre dénomination de la lumière (Lux dite avec un « L ») de celle des hébreux (Awr nommée avec un « R ») ; elle a contribué à suggérer que le phonème « L » de la Lumière élémentaire, enveloppant et constituant l’univers existentiel est (ou serait !) à la fois, l’Être originel tel qu’il s’est manifesté, qu’il a commencé d’exister, de rayonner, donc sa Qualité (KL) et sa gloire (Kleos), et le pré-texte de la sagesse et de l’élévation : un Luxe propre à l’Homme, à des années lumières du luxe existentiel par définition ostentatoire qui renvoie à l’éclairage de l’objet.
Et elle a rejoint à sa manière la façon des japonais de prononcer le « R » originel avec un « L » élémentaire.