Le Pourquoi ?

Croiser les mots

Selon les mots qui les actualisent et leur donnent forme, les langues contribuent à structurer diversement la façon de penser des hommes qui les utilisent. L’understanding des anglo-saxons n’est pas la compréhension des français, encore moins la verständnis gemanique: chaque langue exprime et génère une culture qui lui est propre, et pro-pose ainsi un entendement culturel particulier de l'Intelligence et de l'Être.
Dit avec les mots français, la culture propose d'envisager l'état des choses de la réalité. Dit avec la langue anglaise, elle propose de figurer la réalité en constatant a State of things ou a State of affairs. Dit avec la langue germanique de Ludwig Witgenstein, elle propose d'imaginer Die Sach-Verhalt au cœur d'une Weltanschauung, et elle renvoie, non pas à un état des choses, mais à une chose en soi : "Ding an Sich", qui résulterait de la volonté de la Nature.

Les trois langues européennes, française, allemande, et anglaise, sont significatives : elles donnent une illustration de la façon dont la forme du langage oral est associée au contenu de la culture qu'il véhicule.

Chacune propose un entendement de l’Intelligence qui lui est propre :

L’Intelligence des français renvoie à l'élégance et à l’élection du sujet. L’étymologie du mot renvoie à son origine méditerranéenne et rappelle "l'Elegere" des latins; il désigne en ce sens une aptitude à élire ou à choisir.
Elle renvoie donc aussi à la science, dès lors que l’élégance conduit à un choix opéré en conscience. À l'image de la science - dont l'origine latine du mot, "Scire", rappelle qu'elle consiste d'abord à Scier ou Découper – l’intelligence consiste en une analyse, et elle désigne de ce second point de vue la capacité d'élaborer une définition de la réalité.
Mais elle s'entend aussi comme une lecture de l'intelligible, sans laquelle science et élégance seraient frappées d'incomplétude. Le mot français Intelligence qui renvoie phonétiquement au « Logos » et au « Legein » des grecs - le Verbe des latins -, rappelle de ce dernier point de vue que l'Intelligence méditerranéenne, qui passe aussi par une Réflexion, est à ce titre le moyen ou le médium de la renaissance de l’Homme quand celui-ci est en mesure de réfléchir l’intelligible.

L'Intelligence occidentale des anglo-saxons est en revanche l'objet de la connaissance: elle ne se conjugue pas avec le verbe Être, mais avec le verbe auxiliaire Avoir. Comme pour la Central Intelligence Agency, elle s'envisage comme une information ou comme un renseignement - Data -, destinés à permettre la connaissance de la réalité : il s’agit d’avoir l’intelligence de la réalité, et cette intelligence, nécessairement artificielle, conduit à, et s’assimile au Dataïsme.
La langue anglaise qui ignore le Verbe des latins ne le nomme pas ni ne propose non plus le mot Réfléchir. En dépit du mot emprunté à la Méditerranée, l’intelligence proposée par la culture anglo-saxone n’est pas associée à la réflexion de l’intelligible, mais s’assimile à une conscience: une "Awareness". Elle s'entend comme une capacité - Beware - de veille et de collecte de l'information, autorisant une connaissance élaborée en fonction (How) de ses repères: les "Who, What, Which, Where » et autres « When", permettant un « KnoW- ledge ».
Pour dire Être intelligent, the British Language pose les mots To Be Bright, comme il dit To Be Born ou To Believe, parce qu’il n’entend pas l’Intelligence comme une faculté du sujet de lire ou de réfléchir l’intelligible, mais parce qu’il l’envisage comme une capacité de capter la réalité de l’objet, rendue possible par les sens. Dit avec les mots de John Locke il suggère que l'Homme naît avec un cahier vierge sur lequel il inscrit successivement ses expériences de la réalité.

Comme la langue anglaise, la langue de Schopenhauer, de Nietszche, de Marx, et de Freud, également héritière de la langue germanique nord-européenne, nomme Die Intelligenz et l’envisage comme une conscience. Cependant elle ne l’entend pas de la même manière : de même que la langue anglaise dit Beware, elle dit Das Bewusst-Sein pour dire Être Conscient, mais elle s’en distingue en employant à cette occasion l'article neutre Das, comme elle le fait pour Das Sein (l’Être). Elle souligne ainsi l'importance primordiale de la conscience au regard de l'intelligenz (qu’elle nomme avec l’article féminin Die), de même qu’elle emploie quand nécessaire le pronom neutre Es (que les psychanalistes français traduisent par le Ça).
A la différence de la langue anglaise mais à l’image de la langue française, la langue germanique nomme cependant la réflexion en proposant de dire Die Über Legung. Elle recourt à cette occasion au gérondif Legung dérivé des mots allemands Lie-Gen et Le-Gen, dont Heidegger rappelait qu’ils renvoient au moins phonétiquement au Logos et au Legein des grecs.
Die Überlegung désigne néanmoins une réflexion différente de celle des français. Entendue en allemand l’Intelligence n'est pas la réflexion de l'intelligible à la manière platonicienne des français, mais elle est une faculté d'être en conscience, en harmonie avec la volonté ou le vouloir vivre d’une Nature déployée ou dépliée, régie par un principe cosmique universel : Die Welt als Wille (le monde envisagé comme une volonté de Schoppenhauer). A titre d’illustration, les allemands disent par exemple Perdre Conscience - Bewusstlos Sein - pour signifier Perdre Connaissance, signifiant ainsi que leur conscience est une réflexion de la nature environnante.

En nommant l'Intelligence à leurs manières propres, les langues française, anglaise et germanique en proposent un entendement différent, parce qu’elles associent l’Intelligence ou la Conscience à une façon spécifique de figurer l’Être.
La langue française associe l’Être au Trépas – phonétiquement : n'Être pas -, suggérant qu'il relève d'une dimension Tragique ou Traumatique au-delà de la réalité physique : elle prononce à cette occasion une syllabe consonantique symbolique (TR), signifiant cet au-delà, qu'elle emploie également pour signifier NaîTre, le Trop, le Très, la Transe, le Tri ou l’AuTre, voire aussi le Travail et la Traduction de la Tradition, et le Trépas. La dimension intelligible de l’Être renvoie ainsi à un au-delà de la perception sensible, et l’intelligence est donc une faculté de saisir cette dimension intelligible en la réfléchissant avant de la penser.
Avec la langue anglaise, qui ignore l'intelligible, Être est dit To Be en employant la consonne qui nomme la biologie. En empruntant la base Bheu du proto-langage indo-européen qui renvoie au Bio de la vie organique, avec laquelle elle repère l’existence : To Be Born, To Become, To Belong et autres To Build, elle initialise le verbe To Be, elle désigne l’au-delà - Beyond - comme l’évolution, ou le devenir Darwinien – Become -, d’un être – Being – qui se transforme. L’intelligence renvoie donc à l’observation et au constat que la délibération (To Think) personnelle structure.
Selon la langue germanique, Être se dit Sein, et l’Être est à la fois Das Sein et Das Dasein. L’intelligence telle qu’entendue par les allemands consiste à appréhender la double dimension de l’Être de la réalité et de sa situation topologique: à la fois et dans un même élan, une faculté d'Être - Das Sein -, et une capacité d'Être là, d'Être étant, ou d'exister - Das Dasein, (un mot dans lequel le Da signifie le "Là" de l'exister, et le topoïse, le situe, voire contribue à le diriger, distinguant ainsi la notion de Das Dasein de celle exprimée par le verbe Wiesein qui signifie l’existence entendue comme elle est vécue) -. L’intelligence germanique est donc une saisie de la nature environnante, de son animation, de sa bi-dimensionalité.

Au questionnement personnel et universel de l’Homme, chaque culture collective propose de répondre en posant et en nommant à sa manière l’entendement, l’intelligence, et l’Être, et en contribuant ainsi à formater sa pensée en énonçant ses « étiquettes ».
Chacune renvoie à une archéologie de l’entendement qui lui est propre, parce que son architecture résulte d'une figuration collective et populaire de la manière des hommes de s’interroger au regard du mystère de la Nature.
Chacune renvoie également aux mots qu’elle emploie pour nommer les éléments de cette architecture, parce que ceux ci nomment et structurent les choix architecturaux de la culture qu'ils expriment.

Chaque culture renvoie à la fois à une histoire pluri millénaire et à la figuration collective avec laquelle les hommes ont progressivement proposé une réponse à la crise née du mystère de la réalité; et chacune renvoie en ce sens au récit d’un mythe fondateur, qui permit de faire de la réalité de l’état des choses une notion objectivable.

Nommer l'Intelligence comme le fait la langue française, rappelle que celle ci est l'héritière des langues grecque et latine, et que la cohérence de la langue française renvoie à un héritage culturel méditerranéen proposant d’envisager une Dualité distinguant le sensible qui se perçoit, de l’intelligible qui se réfléchit:
L’intelligible relève de la dimension mystérieuse d’une Troade (TR) - Troie, la cité de Tro - inaccessible par la seule sensibilité, et dont l'accès est interdit par Apollon à ceux qui n'en sont pas dignes.
L'Intelligence, à l'image de Persée, revient à employer le bouclier d’Athéna pour réfléchir l’image de Méduse : elle désigne la faculté de la Personne de faire Paraître l’intelligible en dépit des limites du sensible. Elle conduit à distinguer à cet égard la réflexion ou le Legein des grecs qui fait paraître l’idée ou la révèle, de la pensée qui la structure, et elle suggère à cette opportunité une hiérarchie entre Réfléchir et Penser.
La culture exprimée par la langue française propose d’associer l’intelligence, comme les latins, à la dualité originelle de Janus, le dieu aux deux fronts, « qui sans tourner la tête, voit ce que les autres dieux ne peuvent voir », et qui est aussi le dieu du « Passage » avec lequel Rome a définitivement nommé Janvier.

Nommer l'Intelligence et To Be Bright, comme le fait la langue anglaise rappelle qu'en dépit de ses emprunts aux langues méditerranéennes et de la manière dont elle propose de les interpréter, cette langue est un héritage des Engles et des Saxons, et que sa cohérence renvoie à un héritage culturel nord-européen, qui propose de figurer la réalité visible et invisible comme une Totalité naturelle (a Whole qui renvoie à un Unitarianism), et non comme une dualité.
La langue anglaise, qui exprime une culture sceptique au regard de l'intelligible, privilégie l'awareness: la conscience de l'expérience personnelle consiste à collecter l'information pour penser. Elle néglige en revanche la faculté de Réfléchir parce que la réalité est selon elle une Totalité naturelle et biologique et non une dualité. L’élévation de la pensée n’est pas la réflexion d’un idéal et encore moins celle d’un monde enchanté : elle consiste à franchir le pont arc en ciel - le Bi-frost mythique surveillé par Heimdall - qui lie le jardin (garden) des hommes – Mid Gard - au royaume des ases – As-Gard – de Wodan et de sa demeure – la Wahalla - : un pont qui distingue les deux dimensions d’une même réalité, et non deux réalités différentes.
Elle ne pose pas le mot Culture, et elle propose encore moins d’envisager un questionnement métaphysique. A l’inverse, elle envisage « A way of life » : ce qu’elle nomme Inter-Cultural ne signifie pas interculturel comme pour les français, mais la pluralité des manières de vivre.
A l’image de Wodan le dieu scandinave omniscient - et mortel, à la différence des dieux méditerranéens immortels, quoique non éternels -, elle fait de l’intelligence l’objet scientifique d’une observation.
A l’image de Buri et de Borr, les patriarches Boréens, elle traduit Être par To Be en rappelant que la vie est d’abord et seulement Biologique. Elle fait de l'intelligence, à l'opposé de la langue française, l’objet d’une capture, parce que "Perception is reality".

Nommer Das Bewusstsein comme le fait la langue germanique rappelle que la cohérence allemande renvoie pour sa part à une interprétation de la culture nord-européenne qui lui est propre et qui la distingue de celle des anglo-saxons. La langue germanique, quoique proche de la langue anglaise, renvoie à son tour à une troisième manière d'envisager l’état des choses de la réalité:
Au mot Culture des français elle propose de substituer le mot « Weltanschauung », qui désigne une manière d’envisager globalement le monde (Die Welt). A la totalité de la nature (A Whole) et du monde (World) que figurent les anglais, elle propose de substituer une manière d’envisager la nature de l’état des choses de la réalité comme résultant à la fois, d’une Volonté de vivre (Wille) et d’une Présence de la vie (AnWesenheit), à l’image de Vili et de Vé les deux frères de Wodan, qui ensemble et avec lui constituent la triade mythologique nord-européenne des Wodaz.
Das Bewusstsein conduit à envisager la réalité comme une Gestation (Gestalt) du dépliement ou du déploiement d’un pli : (Die) Falte – Leibnitz nomme en ce sens « Einfalt », et Heidegger évoque un « Ziefalt » -. Dit avec un mot allemand intraduisible en français, la réalité est un couple, ou un Être-en-Deux: « Die Zweisamkeit », résultant de la complémentarité bien venue (Will Kommen) de deux (Zweïn) dimensions inextricablement mêlées. Elle inscrit ainsi la conscience, dans une perspective singulière : la réalité est une gestation permanente, et le mot «Zweisamkeit » qui désigne cet Être en deux, son intimité et la bidimensionalité du couple, rappelle que celle ci renvoie à sa manière propre, à la façon dont les asiatiques figurent l’androgynie de Shiva qui précéda les Aish et Haewa hébraïques et les Hermès et Aphrodite grecs, ou la bipolarité des Xiangs (le Yin et le Yang) à l’origine de l’existant, et qu’elle résulte – à l’image du gouffre originel (Guinnungagap) des nordiques - de l’interaction et de la complémentarité de la lumière et de l’ombre, ou bien encore de la bi-directionalité du « Zu » des perses résultant de la latéralité du pli de (la) Zweisamkeit ; la langue allemande dit en ce sens « Zuvor » (auparavant).

Chaque culture renvoie également à la langue qui a permis d’objectiver la figuration orale grâce à laquelle le récit a été formulé, a survécu, et a été partagé; et chaque langue à l’inverse, renvoie à la formulation proposée par le mythe fondateur de la culture qu’elle exprime.

La langue française suggère une culture de la dualité : elle se distingue en disant aussi bien le Oui (prononcé symboliquement comme le We des anglais) de l'agré(e)ment politique dans l’espace, que le Si essentialiste très latin de l'accord intime et intemporel, issu de la pensée raisonnée et de la réflexion de l’idée. Elle renvoie à une culture méditerranéenne de la dualité, qui s’inspire du nombre Deux pour nommer la préposition « De » qui situe l’origine et la cause dans l’espace et dans le temps.
Imprégnée du grec et formatée par le latin, elle a retenu par leur médiation l'aR-Ka antique des shivaïtes prononcé par l'Inde et le Ka des égyptiens, signifiant l’énergie primordiale générant et structurant l’arbre de la nature (les arkhaï des grecs), dont elle a fait les mots arche et agir, et avec lesquels elle nomme la hiérarchie et la monarchie, mais aussi le charisme de Jeanne d’Arc comme le charme de Carmen ou celui de Chmchon (Samson), ou bien encore l’architecture, l’orchestre, la chirurgie et la chronique.
Avec la syllabe « KR » héritée de cette généalogie, elle donne ainsi à envisager la phénoménologie de la nature en proposant deux KRedos du Sa-Kré : elle suggère aussi bien la croyance (KR) en une création (KR), à l’image de la KhoRa platonicienne, au point de traduire le Bereshith Bara Elohim hébraïque de la genèse de Moise avec le verbe Créer, que la conviction de la réalité d'une querelle (KR) originelle née d’un Kaos, à la façon de Hésiode, donc d'une Crise (KR), dont résulterait la nature, renvoyant ainsi au mot Kriti (KR) qui désigne cette nature dans le mythe de l'indus.

À l'image de la peinture de Raphaël, et dans la perspective dessinée par les méditérranéens, elle suggère aussi bien l'hypothèse de devas (des puissances) empruntée à l'Indus, qu'elle présente comme des divinités immortelles mais non éternelles, que celle d'un dessein naturel marqué du sceau de la téléologie, légitimant au passage la réflexion d'un Verbe ou d'un Logos ignoré par les anglo-saxons.
A l’image de la Magie Noire de Magritte, et dans la perspective dessinée par les nord européens, elle suggère à la fois l’osmose de l’être et d’une dimension mystérieuse et surréaliste, et la faculté magique de cet être matériel, matriciel et maternel de donner la vie; elle propose à sa manière de distinguer au delà des apparences ce qui relève de l’essence – le mot est emprunté au latin Esse -, de ce qui est le propre de l’existence matérielle, stabilisée et structurée.
Si sa Raison latine (Ratio) traduit à la fois la Vernunft et la Verstand des germaniques, (qui autorisent ceux-ci à saisir le destin ou le devenir pré-définis par la norne Ver-dandi du mythe nord européen – l’équivalent de la Klotho des grecs, envisagée par les germains -), la langue française suggère de distinguer l’âme de l’étendue, la charité du corps, la finesse de la géométrie, l’essence de l’existence, l’immatériel de l’atome insécable. Elle propose ainsi deux manières d’envisager la phénoménologie et l’ontologie : son « Je pense donc je suis » renvoie aussi bien à une rationalité qui est le propre de l’Homme, qu’à une co-gitation avec la nature de la réalité qui renvoie à des méditations (Co-Gito conduit à co-giter avec la réalité). Le « je Suis » de l’être pensant y rejoint le « je Suis » de la conjugaison du verbe Suivre.

L’irrationalisme allemand exprimé par la langue germanique propose d’associer l’unicité bi-dimensionnelle (Zweisamkeit) de la réalité et sa globalité (Weltanschauung), parce que Die Welt – le Monde germanique – est envisagé comme double (Zweïn), mais animé par un principe cosmique volitif unique : Die Welt als Wille (le monde saisi comme une volonté).
A l’image du mythe de l’Indus, il donne à envisager le Wodan germanique avec le regard des brahmanes : il signifie en le nommant - non pas la divinité hénothéiste d’une dimension mystérieuse et théiste comme le théorisent les méditerranéens -, mais la synthèse symbolique d’une triade vitale (l’Indus dirait : une Trimurti) désignant la dynamique née de la complémentarité des frères de Wodan : Vili (la volonté) et Vé (le vivant), à l’image de celle de Vichnou et de ShiVa (l’immanent et le structurant). Die Wille (le volitif naturel qui se prononce Vile) anime Die Welt (le monde, prononcé Velt), et l’homme, entendu comme un animal sauvage : Wildes Tier.
La langue germanique prononce à ce titre d’une façon qui lui est propre, Tsveisamkeït, Tsveï et Tsu, pour dire respectivement les mots Zweisam-Keit, Zwein (deux) ou Zu (souvent associée à la préposition « à » de la langue française, mais aussi à son « de »). A l’image des langues orientales, elle recourt à la bi dimension et à la bi direction de la syllabe « TS » du Zhou Yi des chinois (prononcé Tzou Yi) et du Tse chinois de Lao Tseu, à celle du Tse du syllabaire japonais, de son Tsunami dans l’espace ou de son Tsuzuku (continuité) dans le temps, ou bien encore à celle symboliquement dessinée par le Tsadé hébraïque ( צ ) avec lequel Moïse nomme le « Côté » d’Adam (Tsel), signifiant le contenu instable dont naît le contenant stabilisé, le cataclysme qui précède la catastrophe, ou encore la maturation qui prépare la structuration.
Elle suggère ainsi à cet égard, une transformation ou une transmutation précédant la manifestation ou l’aparition phénoménologique, et elle laisse entendre en conséquence le mythe scandinave dont elle s’inspire, comme une théorie uniciste du mouvement, bi-dimensionnel et bi-directionnel (c’est le sens de Tsweï), et non pas duale ni hierarchique, selon laquelle l’éternité perpétuelle – Ewig-Keit – se distinguerait de l’immortalité des méditérranéens.
Dit avec les mots de ses philosophes, le Soi de Ding an Siche (la chose en soi) sans laquelle il ne serait pas de (Das) Sein, comme le pronom neutre « eS » (le Ça des psychanalistes français), rappellent phonétiquement la Sing des chinois, la Sat de l’Indus, et l’Aïn Soph des hébreux; il renvoie à ce titre à une essence non finie qui échapperait à la sensibilité de l’Homme par définition finie, imaginée comme une dimension insaisissable, et qui s’exprimerait sous la forme d’une Volonté de la nature universelle: le Wu des uns, le Wo des autres, ou bien encore Die Welt als Willie résultant de la mise en oeuvre d’une interaction de puissances complémentaires (ce que l’Indus nommerait De-Va).

La langue anglaise enfin, ne retient pas comme le font la langue française et la langue germanique la réflexion d’une dimension mystérieuse; elle se satisfait de constater que la matière materne la vie. A l’unicité des allemands qui rappelle la trinité (Trimurti) de l’indus, et selon laquelle la réalité serait le fruit d’un principe volitif naturel bipolaire (Ve et Vili, les frères du Wodan scandinave), et à la dualité des français qui propose d’envisager à la manière des méditerranéens la réflexion d’une dimension intelligible, la langue anglaise oppose de figurer la réalité comme une Totalité : as A Whole.
A la langue des français qui questionne le Kaos et la Khora avec les conjonctions Quoi, Qui, Quand, et Comment, de même qu’elle nomme la Quidité du liQuide aQueux, en prononçant ses mots avec le Ka des shivaïtes, le Ka de l’énergie vitale des égyptiens, ou le Ki des chinois, la langue anglaise oppose en la constatant (Watching), la réponse (Ans-Wer) proposée par une nature universelle, avec What, Who, Which, Where, When, et How, qu’elle inscrit au sein d’une totalité : a Whole, et qui rappellent phonétiquement et opportunément que le liquide aqueux des latins se nomme Water en anglais.
Elle recourt à cette occasion à la consonne initialisant la dénomination du Wo Dan du mythe scandinave, à l’image de celle du Wu Ji originel du Dao des chinois désignant le mouvement dont serait issue la manifestation phénoménologique.
Elle propose, à la différence de la langue française, de situer les repères de l’analyse dans la totalité – Whole – d’un monde – World -, en incluant – by the Way - le Where, que la langue française au contraire distingue avec une voyelle, qu’elle ignore mais prononce néanmoins: Où ou Wou (d’évidence, un son, une vibration ou une voyelle qui ne s’assimile phonétiquement, ni au O ni au U, qui composent sa dénomination).

Aux langues française et germanique qui emploient généralement des verbes articulés par des particules qui les précèdent (Ver-Stehen pour les allemands ou Pré-Voir pour les français), pour signifier par avance la façon d’en orienter la signification et clarifier a priori le phénomène qu’ils décrivent, la langue anglaise oppose le plus souvent des verbes suivis d’une particule qui les accompagne a posteriori (To Come back):
A la langue allemande qui dit Sich Verhalten, pour signifier Se Comporter ou To Behave, - en recourant au Vé qui nomme le frère de Wo Dan et au Ver de la norne Ver Dandi -, comme à la langue française, inspirée du latin qui prépose la syllabe « PR » précédant – préjugeant et prédisant - le verbe dans Préférer, Prévoir ou Prévenir, la langue anglaise oppose sa façon de poser la particule après le verbe pour signifier une manière de l’interpréter:
Back, Down, Over, ou Up contribuent ainsi à expliciter cette interprétation en constatant la circonstance du phénomène a posteriori, après qu’il ait été observé (Watch). Sauf exception, comme c’est le cas avec un verbe prépositionnel comme To Under-Stand, la langue anglaise invite à constater – To ascertain – le phénomène a posteriori, plus qu’elle n‘en suggère une interprétation a priori.

L’Under-Standing de la langue anglaise rappelle en ce sens que la compréhension des anglo-saxons consiste à aller sous (Under) ce qui se tient (le Stand de la Situation) - ce que le latin nommerait Substance -, et non pas au delà d’une observation de l’objet sensible. Il s’inscrit dans une perspective et une cohérence différentes de celles des langues française et germanique. Il résume la cohérence d’une langue anglaise inspirée du mythe nord européen et qui en dit sa propre interprétation.
A la différence de la langue germanique dont elle est pourtant proche, la langue anglaise entend le Guinnungagap du mythe scandinave - le gouffre originel sans fond, issu de la confrontation du chaud et du froid, de la lumière et de l’obscurité -, comme le symbole de la gestation d’une évolution, et non comme celle d’une transmutation de la volonté de vivre.
Elle renvoie au mythe scandinave qu’elle interprète comme le récit d’un univers né d’un conflit, mais aussi et surtout à l’origine d’une biologie ou d’un Big Bang : la gestation d’un Guinnungagap Boréen dont sont issus Bestla, Buri, et Borr, donc l’Être : To Be, et leur descendance Wo Dan, Ve et Villi, donc les façons d’envisager sa Volonté, destiné à disparaître avec le crépuscule des dieux, avant une renaissance animée par Baldr, l’héritier de Wo Dan et symbole d’un nouveau début de l’humanité.

Elle suggère une culture qui constate la totalité d’une réalité en mouvement telle qu’elle parut – actually, as a fact - telle qu’elle évolue, et telle qu’elle sera bouleversée, à l’image des nornes nord européennes Urd, Verdandi et Skuld; mais elle en néglige l’origine mystérieuse a priori, pour se suffire d’en constater l’évolution a posteriori.

Comme toutes les langues, chacune des trois langues européennes exprime la culture d’un groupe humain, et laisse donc entendre une manière particulière d’envisager la réalité et de la mettre en perspective:
La langue française qui propose de nommer un Etat des choses, propose une cohérence qui renvoie à l’Ëtre de cet Etat, et à la dimension mystérieuse du Verbe des latins ou du Logos des grecs animant cet être.
La langue germanique qui propose de nommer cet état des choses, Die Sach-Verhalt, affirme sa cohérence en renvoyant à une manière de se comporter (Verhalten) inspirée de Ve et de Vili, les deux frères de Wo Dan, symboles des deux dimensions d’une Volonté de la Nature, dont l’expression conduit et accompagne l’état des choses.
La langue anglaise enfin propose de nommer a State of Things ou a State of Affairs, qui renvoie pour sa part à l’objet qui se perçoit, tel qu’il se tient (Stand) et tel qu’il est « actually » (en fait) en situation (ST), parce que sa cohérence résulte du primat de l’expérience personnelle.

L’écoute des langues conduit en ce sens à un premier constat : quoique chacune d’elles pose l’expression d’un entendement culturel particulier, chacune emploie les grammes d’une grammaire orale commune, et renvoie à l’universalité de l’écoute d’un même langage oral. Chacune renvoie à une généalogie, et ainsi aux éléments phonétiques premiers d’un langage oral universel :
Toute langue est élaborée en fonction de sons ou de vibrations (un Verbe) universels, prononcés par la voix de l’Homme; et chacune résulte en conséquence d’une combinaison des éléments phonétiques que la grammaire du Langage oral universel permet aux hommes depuis le grand bond oral de l’humanité. Chacune d’entre elles renvoie à ce titre à l’hypothèse dite de Sapir-Whorf d’une universalité phonétique.
L'Homme – le Man, ou l’Hu-Main - à l'image du Manuh asiatique de l’Indus, est le grand législateur du règne animal depuis que la Parole lui a permis de faire paraître en la figurant, la chose qu’il envisageait et qui ne relevait jusqu'alors que de son imaginaire; et parce que son Mana – la Manière qui lui est propre mais aussi sa Magie, telles qu’elles sont nommées par l’Océanie – l’autorise à penser en parlant.
Il emploie a ce titre les mêmes grammes ou les mêmes éléments d'un langage oral universel, quoiqu'il les combine différemment : chaque langue renvoie ainsi par exemple à une Matière élémentaire et l’associe à la Maternité et à la Matrice en employant une même consonne « M ». De même, l'intel-Ligence des français, le Legein des grecs, le Liegen des allemands, comme le Lagu du vieux norois dont les anglais ont fait leur mot contemporain Law, renvoient phonétiquement à une même syllabe « LG » héritée d’un proto-langage indo-européen, et valorisée par le sanscrit.

L’écoute des langues conduit ainsi aussi à un second constat : chacune d’elles témoigne de sa cohérence en « Systémisant » sa manière d’employer ce même répertoire phonétique, en accompagnant et générant à la fois la culture qu’elle exprime et qu’elle véhicule pour formuler l’entendement.
Chaque langue suggère à cet égard que les éléments phonétiques seraient des Phonèmes universels destinés à nommer la réalité de l’état des choses. Chaque langue renvoie ainsi à une sémiologie de la parabole et de la parole, et aux éléments phonémiques et symboliques de ce même langage oral.
Ensemble, elles suggèrent à cette opportunité, que leurs signes - des sons naturellement prononcés par la voix de l'Homme - ne sont pas seulement des signes mais des sèmes, qui renvoient à une symbolique universelle. En employant la consonne « B » pour dire aussi bien l'arc (Bow) que le bio (To Be), la langue anglaise par exemple, à la différence de la langue française, néglige le « V » de Vichnou, du Verbe latin, et du Verhalten de l'allemand, pour souligner une façon d'envisager la Biosphère, son début-Beginning, sa Birth, et son évolution (Born, Being, Buiding, et Becoming) : comme toutes les langues elle emploie ce phonème pour signifier le dé-but de l’existant, mais avec le « B » universel, elle choisit – comme la langue grecque qui ignore le « V » de la vie - de nommer la vie des êtres (Being) d’une manière spécifique.
En dépit de leurs différences, les langues renvoient à ce titre à l’hypothèse formulée par Claude Levi Strauss, d’un « Répertoire » phonémique universel, dans lequel elles puiseraient les mêmes sèmes universels pour les combiner en un sémaphore particulier, au moyen de « systèmes » qui en organisent la lecture.
Au delà de l’étymologie, la généalogie et la sémiologie renvoient à ce répertoire en vertu d’un jeu de correspondances symboliques entre les langues elles mêmes ; et au delà de la diversité des entendements culturels particuliers, l’écoute des langues suggère un entendement universel des grammes d’une grammaire phonémique.

Enfin, au delà de la généalogie et de la sémiologie, l'écoute des langues témoigne d’évidence de l'universalité de la faculté de l'Homme de réfléchir et de penser, et de celle de sa capacité de parler pour dire cette réflexion et cette pensée. Elle renvoie à une archéologie de la culture et de son expression:
Au delà de l'entendement culturel, elle conduit à poser la question de l'origine du Verbe - du Word, du Wort, et/ou du Logos pour d’autres -, et à celle de la Parole par laquelle il paraît, et grâce à laquelle on l'écoute.
Elle conduit également à poser la question de l'origine de la réflexion qui est ainsi révélée, verbalisée, et (dé) livrée par le livre de cette même Parole; et elle renvoie ainsi alors à l'hypothèse de l'universalité d'une "Surconscience" telle qu'elle fut élaborée par le français Paul Diel, voire à celle d’une Mémoire partagée – « Presence of the past » - telle qu’élaborée et dite en anglais par Rupert Sheldrake.

L’écoute des langues suggère en ce sens, de ce triple point de vue, que Cultures, Mythes et Langues sont indissociables puisque la généalogie des mots, la symbolique des phonèmes, et l’évolution de la conscience des hommes, conduisent à constater que, quoique différentes, elles témoignent d’une convergence en vertu de laquelle cultures, langues et mythes ont en partage l’universalité de la figuration orale.

L’écoute des langues conduit de ce dernier point de vue à parier sur l’origine mythologique du récit culturel et de son véhicule linguistique, en distinguant deux manières d’envisager la Mythologie : l’une renvoyant à la double dimension d’un Muthos universel et de son langage, l’autre, renvoyant en revanche à la pluralité des lectures que les mythes en ont proposée et à la pluralité de leurs langues.
Elle suggère dans cette hypothèse que la Culture renvoie à la logique universelle d’un Muthos – les grecs évoqueraient la logique de son Logos - et à un Schéma phonémique, mais que chaque culture renvoie en revanche à une logique particulière qui renvoie elle même à la lecture d’un mythe fondateur et structurant.

Dit avec le mot des grecs, la Culture renvoie d’abord à la double dimension universelle du Muthos :
Le Muthos-récit, entendu comme le récit ou la parabole que les hommes ont élaboré pour répondre à la colère résultant de leur impuissance face au mystère de la réalité;
Mais aussi le Muthos-Mot entendu comme une formulation de ce récit, et une manière des hommes de poser leur réponse avec le langage oral qui les distingue au sein du monde animal.

Le Muthos est en ce sens le champ d’investigation d’une archéo-logie universelle de la Culture:
Il est « archéo » parce qu’il renvoie à l’aR-Ka primordial du mythe de l’Inde, et à une arche originaire qui éclaire aussi bien les archaï des grecs – des principes, qu’Hésiode nomme Eros et Kaos avec les mêmes consonnes « R » et « K » que l’aRKa indien -, que les mots qui en sont dérivés depuis. La figuration collective qu’il propose éclaire la généalogie des cultures et des langues des hommes.
Il est « logique » parce qu’il renvoie également au Lin-Ga de l’Inde: le mot-nom, le sème-symbole, ou le phonème (qui fait entendre la dénomination), avec lequel le mythe indien a désigné l’origine de l’onde première de la catastrophe originelle (le big bang de nos scientifiques contemporains) qui présida à l’apparition de l’état des choses de l’univers.
La syllabe consonantique « LG » qui radicalise ce LinGa éclaire une sémiologie des mots que nous offrent les langues dans leur diversité, qu’il s’agisse du Logos des grecs, du Legen germanique, du Lagu scandinave, ou finalement du Langage et de l’intel-Ligence des méditerranéens.
Elle rappelle que le Muthos renvoie aux Hiero-Logoï, les discours sacrés de la tradition qui narraient l’histoire de l’univers avant que ne le fit la Grèce d’Orphée, d’Hésiode, et d’Homère, et dont celle-ci a hérités.
Il renvoie enfin au scenario d’une logique archaïque datée par ces derniers depuis Khronos (KR), dont le secret fut résumé en un mot par Archimède : euRé-Ka (R & K). Il renvoie à ce titre à une archéologie de la culture fondée à la fois sur une intelligence du récit et sur une intelligence du mot: il renvoie tout à la fois à une Kriti indienne (la Nature telle que nommée par l’Indus), aux Neters (les principes de la Nature des égyptiens), à une Phusis grecque (la nature des grecs), ou à une Nature plus latine. Il éclaire à ce titre les différentes manières d’envisager et de nommer l’état des choses d’une même réalité de la nature, mais aussi la phénoménologie destinée à expliciter l’origine de l’apparition de l’univers et de son big bang : la cosmogonie d’un Kaos, la Kata issue d’un cataclysme et d’une catastrophe, comme la Khora créatrice platonicienne et l’éventuelle création d’un démiurge, ou le Kaoun universel des arabes.

De même que le Muthos-Récit est le champ d’investigation d’une archéo-logie de la Culture, le Muthos-Mot est également celui d’une architecture des langues :
Avec ses phonèmes, le Muthos propose de figurer un schéma phonémique, et avec son récit, l’image orale d’une échelle phonétique, l’un et l’autre destinés à permettre aux hommes d’objectiver l’être, la réalité de l’état des choses, et d’envisager ainsi leur situation et le medium d’une élévation.
Le Muthos renvoie à une universalité du langage oral dont les langues sont la mise en œuvre : il tisse une texte originel dont les langues s’inspirent :
La Sat de l’Indus, le Set de l’Egypte, qui nomment une dimension essentielle avec la syllabe consonantique « ST », SiTuent l’univers d’eSt en oueSt, et la même syllabe « ST » nomme consécutivement l’aSTre, la STella et la STar qui repèrent et structurent la situation, et mettent le Standing des uns et le Style, la Stature, ou la PoSture des autres, en perspective.
De même la TaMas de l’indus et son Mat, comme la Mout et la Maat de l’Egypte, ou les Maeva ou Morgane des celtes, en recourant à la consonne « M » (Signe, Sème et Phonème à la fois) posent la dimension matérielle élémentaire de l’univers, et sa Li-Mite du double point de vue de l’objet et de celui de sa perception par l’Homme.
Chaque langue renvoie ainsi à une universalité du répertoire posé par le langage parlé dont les hommes ont hérité du grand bond oral de l’humanité :
Chacune combine les grammes universels d’un même répertoire pour formuler avec sa grammaire les mots et les dénominations des agents de sa cosmogonie et de ses héros, engageant ainsi les hommes à s’approprier une communication politique qui contribue à formater leur entendement.
La Culture renvoie à ce titre à l’universalité d’un récit et d’un langage. Elle est à l’image de la démarche d’Oxylus, le héros déchu redevenu roi: elle renvoie à un héritage Héra-Kléen et au « Logos » d’un « Nostos » douloureux (Nostalgie : Nostos, Algos) qui lui inspire un récit, et à sa manière de le faire exister. Comme pour Oxylus, elle propose aux hommes de s’entendre au moyen d’une Lexis, en élaborant une Doxa qui leur permet à la fois une semblance et une opinion commune, et en réunissant à ce titre leurs existences sur une Agora pour fonder un Nexus social.

La diversité des cultures renvoie en revanche à la pluralité des mythes : les cultures collectives se distinguent par leurs lectures particulières d’un Muthos–Récit universel, en l’envisageant à leurs manières propres, du double point de vue du récit et de la langue.
Chacune d’elles renvoie à un mythe fondateur qui donne à envisager le récit et l’architecture du Muthos-Récit universel selon une intelligence particulière ; et chacune laisse entendre une cosmogonie et l’aventure de ses héros, en adoptant sa propre manière de lire une même cosmogonie universelle.
Les mythes sont de ce point de vue fondateurs : tous les mythes renvoient à une cosmogonie - donc à un cataclysme, une catastrophe ou une transformation à l’origine de l’univers, et aux galaxies qui en sont nées -, mais chacun d’eux en propose une lecture particulière en systémisant les éléments symboliques d’information proposés par le répertoire sémiologique du Muthos. Pour le dire avec les mots de Claude Levi Strauss, chaque culture propose son « Système » culturel propre en fonction du style de son mythe fondateur et de sa lecture du Muthos; Antonio Gramsci évoque en ce sens « l’Hégémonie culturelle » qui préside aux différentes façons de penser, dont les racines seraient (au moins partiellement) les récits mythologiques particuliers propres à chaque société.
Chaque culture est véhiculée par une langue qui nomme à sa manière une phénoménologie : le mystère du rapport physique ou de la relation affective qui lie l’arbre de la grâce et l’arbre de la nature, et préside en conséquence à la façon d’envisager et de nommer la manifestation ou l’apparition de la réalité de l’être et de l’intelligence.
Les mythes sont de ce second point de vue formateurs : ils sont à l’origine de la pluralité linguistique, et à ce titre le pré-texte de la diversité culturelle et de la structuration de la pensée de ceux qui s’y réfèrent, et par voie de conséquence, le prétexte de la pluralité de l’élaboration du sytème de valeurs de la Philosophie et celui de la diversité de la communication Politique.
En « combinant » – pour reprendre à nouveau les mots de C. Levi Strauss – les phonèmes issus du « Répertoire » pré-posés et pré-dits par le Muthos pour formuler leurs mots, les mythes sont à l’image du livre de Toxaris le scythe dont la parole redit l’enseignement d’Asclepios, et le pré-texte de la diversité des langues qui expriment et contribuent à formater cultures et philosophies.

Ils contribuent avec le « Style » de leurs langues respectives à « Systémiser » la communication politique que permet la langue elle même. Ils sont à ce dernier titre le modèle architectural de la structure langagière collective du groupe concerné par un récit fondateur. Dit avec le mot d’Edward Sapir, ils systémisent la communication en posant leurs propres « étiquettes » tout en combinant des phonèmes relevant d’un répertoire universel.

Le mal entendu résultant de la pluralité de l’entendement proposée par les mythes et formaté par leurs langues respectives, occulte l’écoute de l’universalité du Muthos. A l‘inverse, l’écoute du langage oral, suggère que la pluralité des langues qui le mettent en œuvre témoigne, non pas d’une confusion Babélienne, mais d’une diversité culturelle nécessaire au questionnement des hommes.